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Titre : |
Un exemple de prairie hygrophile primaire juvenile : l'Oenantho lachenalii-Molinietum de la zonation d'atterissement rhénane résultant des endiguements du XIX° siècle en moyenne Alsace |
Type de document : |
texte imprimé |
Auteurs : |
Roland Carbiener, Auteur |
Année de publication : |
1978 |
Article en page(s) : |
pp. 13-42 |
Langues : |
Français (fre) |
Catégories : |
[ZG] ALSACE (42) [habitats/milieux] 37 - Prairies humides et mégaphorbiaies [habitats/milieux] ZH - Zones humides
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Mots-clés : |
association végétale relevé phytosociologique |
Résumé : |
"L'Oenantho-Molinietum a été décrit pour la première fois par PHILIPPI (1960) dans la plaine rhénane et rattaché au Molinion. Depuis, des groupements homologues, vicariants géographiques, ont été reconnus, par ex. des marais littoraux atlantiques par WATTEZ (1968).
Or, dans la partie centrale de la plaine rhénane alsacienne, près de Rhinau, ce groupement occupe des chenaux d'atterrissement à l'intérieur d'un complexe forestier ripicole. Ces chenaux, d'accès souvent malaisé, sont inexploités par l'homme. L'association s'intègre dans les zonations naturelles en une frange plus ou moins large coincée entre le Caricetum elatae et des groupements arbustifs pionniers ou de manteau (Salici nigricantis - Viburnetum opuli).
L'intérêt de l'étude particulière d'une telle association réside dans son caractère primaire ou quasi-primaire allié à une structure de type prairial. C'est au niveau des plaines d'Europe occidentale, un des rares groupements spécialisés primaires de statut prairial. En effet, sa structure et sa composition floristique (riche : au moins 80 espèces herbacées dans la dition) sont proches de celles des prairies de fauche secondaires du Molinion, donc distinctes de celles des Roselières et Mégacariçaies dont elles peuvent toutefois prendre l'aspect !
Ces données sont discutées. Du point de vue sociologique, l'association est manifestement située à la charnière entre l'Eriophorion latifoliae (dont les caractéristiques tendent à prédominer numériquement) et le Molinion. C'est la plus évoluée des associations primaires de bas marais calciques. La composition floristique reflète son statut primaire par la quasi-absence des espèces caractéristiques des Molinio-Arrhenatheretaea. Ces espèces sont en fait des taxa (écotypes) anthropogènes et eutrophes, créés par la sélection involontaire que constitue la fauche régulière, à partir d'espèces collectives de grande plasticité génétique.
Par contre, les espèces caractéristiques du Molinion (Molinietalia) que comporte l'association sont en majeure partie communes avec celles des prairies primaires des rives des fleuves nord-est-européo-sibériens. Le charriage intensif des glaces à la débacle printanière exclut en effet les ligneux d'une partie des lits majeurs de ces fleuves. Aussi ont-ils fourni d'importants contingents d'espèces prairiales. Enfin, des plantes absentes des prairies fauchées sont abondantes, tel le Roseau (Phragmites, pouvant donner un aspect de pseudo-roselière),tel surtout le Chardon (Cirsiwn arvense).
L'écologie de l'association est discutée: situation géomorphologique création de ses stations actuelles par les endiguements du 19ème siècle.
L'étude de sa répartition spatiale, en fonction des variations des facteurs géomorphologiques-hydrologiques, donne des clefs d'interprétation écologique, présence ou absence, variation de l'extension de l'association dans les zonations du complexe ripicole du lit majeur du Rhin. Elle occupe des stations mésotrophes sur sols bruts inévolués, donc pauvres en humus, de profil G C, l'horizon de gley étant limono-sableux et peu argileux, le sous-bassement généralement sableux et graveleux. La nappe phréatique y oscillait entre les niveaux + 40 et - 60, mais a été stabilisée et abaissée par les récents travaux du Canal d'Alsace (l'amplitude devient + 10 à - 10 et - 30 à - 50). Un substrat de texture particulièrement fine pour les conditions rhénanes (où dominent sables et graviers) et un niveau d'eau particulièrement stabilisé (endiguements ou marges externes du lit majeur protégeant contre l'inondation par eaux de surface) sont des conditions principales de l'existence de l'association.
La dynamique, métastable de l'association, est enfin examinée. Sa résistance à l'envahissement par les ligneux n'est que relative: l'association est souvent imbriquée en mosaïque avec des plages de ligneux (Salici-Viburnetum). ou arbustes isolés. Ces derniers sont épisodiquement tués par asphyxie racinaire. Cet équilibre dynamique précaire est à la merci de modifications mineures du régime hydrologique. Aussi n'est-il pas certain que l' association pourra se maintenir du fait des modifications profondes du régime hydrologique par le Canal d'Alsace (achevé entre 1964 et 1967 dans la dition).
Il est probable, mais aucun document ne permet de l'étayer, que l'association ait déjà existé dans le lit majeur du Rhin avant les endiguements du 19ème siècle. Ceci en tant qu'élément des zonations alluviales brutes des marges, protégées par des levées et formant des dépressions marginales mineures, du lit majeur principal (annuel 'à décennial). Des formes secondaires (fauchées) de l'Oenantho-Molinietum peuvent aussi être observées. Elles s'enrichissent alors en espèces de petite taille et eutrophes.
Par contre, au niveau des dépressions marginales majeures les plus externes, situées sur les franges du lit majeur millénaire ou séculaire, les bas-marais tourbeux de la vallée du Rhin connaissaient une large ex tension de l'Orchido-Schoenetum (Eriophorion latifoliae) extension attestée par des documents historiques. Les dernières stations de cette association ont été récemment détruites en Alsace.
L'Oenantho -Molinietum constituait donc avec l'Orchido- Schoenetum un réservoir primaire (parmi d'autres) d'espèces à potentialités écologiques prairiales qui se sont, par la suite, intégrées dans les prairies anthropiques mésotrophes extensives du Molinion progressivement constituées par la fauche. Dans la vallée du Rhin, c'est depuis peut-être 2000 ans que des prairies secondaires extensives de ce type ont pu évoluer, d'où leur intérêt scientifique (travaux de biosystématique de A. BERNARD)" (source : auteur) |
Type de publication : |
périodique |
Référence biblio : |
Carbiener R., 1978 - Un exemple de prairie hygrophile primaire juvenile : l'Oenantho lachenalii-Molinietum de la zonation d'atterissement rhénane résultant des endiguements du XIX° siècle en moyenne Alsace. Colloques phytosociologiques, 5 : 13-42. |
ID PMB : |
19634 |
Permalink : |
http://www.cbnbrest.fr/catalogue_en_ligne/index.php?lvl=notice_display&id=19634 |
in Colloques phytosociologiques > vol. 5 (1976) . - pp. 13-42
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