[article]
Titre : |
Diversité biologique et diversité culturelle |
Auteurs : |
Philippe Descola, Auteur |
Année de publication : |
1999 |
Article en page(s) : |
pp. 25-37 |
Langues : |
Français (fre) |
Catégories : |
[Thèmes] Relation homme - environnement
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Mots-clés : |
population tribale protection de la nature technique traditionnelle de subsistance |
Résumé : |
"Depuis quelques années, notamment depuis le Sommet de Rio sur l'environnement, l'idée a commencé à se faire jour que la protection de la nature et la préservation de la biodiversité passent aussi par le droit des populations tribales à préserver leurs territoires et leurs modes de vie dans des espaces soustraits à la déprédation des ressources naturelles non renouvelables. Pour beaucoup de biologistes, habitués à percevoir les populations humaines comme des facteurs de perturbation et de dégradation des écosystèmes, cette idée a longtemps été iconoclaste. Sans doute faut-il voir là un héritage des préjugés de l'agronomie coloniale qui a longtemps considéré que certaines techniques de subsistance de la zone tropicale, tels l'essartage ou l'écobuage, étaient à la fois improductives et dommageables pour le milieu. Sans doute aussi une telle attitude résulte-t-elle du processus de formation de maints parcs naturels, notamment en Afrique, conçus à l'origine sur le modèle européen des réserves de gibier. La chasse sélective pratiquée par les populations locales pour leur subsistance ne pouvait dès lors apparaître que comme une forme de braconnage mettant en péril la survie de certaines populations animales. Mais c'est surtout le divorce épistémologique entre les sciences de la nature et les sciences humaines, consommé dès la fin du 19e siècle, qui incite encore certains biologistes intégristes à récuser l'idée que la présence de certaines populations humaines utilisant des techniques traditionnelles dans des zones d'écosystèmes fragiles puisse contribuer à la préservation et à la diversité des populations non humaines.
Or, l'on sait à présent qu'il n'existe guère sur la planète d'écosystème qui ne soit pas plus ou moins anthropisé, quand ils ne sont pas, tels les oasis ou certaines forêts européennes, entièrement le produit de l'action des hommes. L’on mesure aussi mieux maintenant à quel point certaines techniques traditionnelles de subsistance ont pu contribuer non seulement à préserver la biodiversité végétale, mais aussi, dans certains cas, à l'augmenter. L’on commence aussi à comprendre que les savoirs et les techniques accumulées par les population tribales au cours de millénaires d'expérimentation agronomique et biotechnologique patientes constituent un trésor de connaissances efficaces en même temps que la base d'une gigantesque banque de variétés d'espèces cultivées qui constituent pour l'humanité un précieux patrimoine végétal. On a pris conscience que la gestion extrêmement complexe des populations animales et de leur démographie dans certaines réserves naturelles des pays en voie de développement était en fait rendue moins malaisée lorsque l'on autorisait les populations locales à pratiquer à nouveau une chasse sélective qui avait contribué pendant plusieurs siècles à réguler l'équilibre délicat entre prédateurs et proies." (source : auteur) |
Type de publication : |
périodique |
Référence biblio : |
Descola P., 1999 - Diversité biologique et diversité culturelle. Aménagement et nature, 135 : 25-37. |
ID PMB : |
27425 |
Permalink : |
http://www.cbnbrest.fr/catalogue_en_ligne/index.php?lvl=notice_display&id=27425 |
in Aménagement et nature > n°135 (1999) . - pp. 25-37
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